A quoi cela ressemble-t-il d’être un adolescent en 2024 qui découvre la sexualité ?
L’hypersexualisation sur les réseaux sociaux
Il y a de grandes chances pour que cela commence sur les réseaux sociaux. Plus rien d’étonnant aujourd’hui à tomber sur des corps à peine couverts. Des personnes réduites à leurs attributs exhibés. Leurs visages passeraient presque inaperçus. Ce qui compte c’est la forme, la taille, l’exagération…pourvu que ça excite. Cette hypersexualisation s’est invitée au fil des décennies à travers les images de propagande après guerre qui ont donné naissance à la publicité. Les magazines et les vidéos ont pris ensuite le relais jusqu’à l’explosion du contenu sur Internet.
La pornographie
Des réseaux sociaux aux sites pornographiques, il n’y a qu’un pas. Là où 30 ans auparavant le contenu X était réservé aux abonnés de Canal Plus, dissimulé aux lecteurs avisés de magazines ou de VHS, aujourd’hui il est accessible à tous gratuitement, facilement avec une diversité de contenus déconcertante. Y’a-t-il encore un semblant de scénarios pour les mises en scène ou se focalise-t-on uniquement sur l’acte ? A savoir la pénétration. Car, selon ces vidéos, c’est le but de tout rapport sexuel, après éventuellement quelques préliminaires.
Les archétypes
Notre adolescent qui découvre cet univers imprègne ses yeux, son esprit, d’un rapport de domination entre l’homme et la femme. L’un soumettant l’autre à son désir. Il semblerait peut-être que le plaisir soit partagé mais bien souvent un rapport de force s’établit. En filigrane, c’est l’acte de viol qui est véhiculé et s’inscrit dans le subconscient. Ainsi, au plaisir est associée la violence. La sexualité devient un terrain de jeu dangereux où pour éprouver plus de plaisir, il va s’agir d’augmenter le niveau de souffrance.
Le centre des plaisirs inversés
Éprouver du plaisir dans la douleur fait partie des indicateurs d’une sexualité déviante. Car le corps et l’esprit s’habituent à la souffrance. Ce n’est pas naturel, c’est un conditionnement acquis. On ne né pas violent, on apprend à endurer la souffrance. Et ce n’est souhaitable pour personne, car la violence appelle la violence et c’est une spirale involutive, d’auto-destruction.
Comment en arrive-t-on là ?
Comment est-il possible de coupler dans notre cerveau le plaisir et la souffrance ? Ce peut être dans l’enfance où pour bénéficier de quelques attentions, de quelques marques d’affection, l’enfant servait en même temps de réceptacle au mal-être d’un parent. Pour bénéficier de sa présence, il devait subir ses accès de colère, ses critiques, sa bile déversée sans condition, ses gestes brusques parfois quand ce n’est pire. Alors plutôt que de ne rien recevoir, ce qui est impensable pour l’enfant, son développement et sa survie psychique en dépendent, il a accepté. Il a pris ce duo diabolique et s’est enregistré en lui qu’avec le plaisir vient la souffrance.
Pratiques démocratisées
L’adolescent apprend l’acte punitif qu’est le sexe à travers la pornographie. La tendresse, l’affection et encore moins les sentiments n’ont leur place ici. La sexualité est complètement décorrélée du coeur. Elle est un moyen de se donner du plaisir éphémère et d’afficher une forme de liberté, pense-t-on. Comment continuer d’écouter ce qui est juste, ce que notre corps nous dit du plaisir quand a été programmé dans notre subconscient de telles images, de tels comportements ? Soit les deux adolescents qui ont un rapport sont programmés par cela, soit seulement l’un des deux. Mais dans ce cas-là, l’autre devra être suffisamment fort, solide avec une bonne connaissance de lui-même, d’elle-même pour affirmer d’autres choix. Mais cela se passe-t-il réellement ainsi ?
Le désir par la vue principalement
Notre culture de l’image envahit l’organe de la vue. Nos yeux enregistrent des milliers de représentations du corps, des représentations souvent stéréotypées, très éloignées des corps naturels, qui sont variés dans leurs spécificités et évoluent en fonction des expériences de vie. Rien de lisse et de parfait là dedans. Ainsi les rapports intimes n’existent plus sans que le regard soit sollicité comme source de désir, se remémorant consciemment ou non, des images mentales pornographiques, des positions vues et à reproduire. On n’est plus seulement acteur mais spectateur de son propre rapport.
Le conditionnement à l’objet sexuel
Avec la pornographie, le corps n’est plus magnifié mais objetisé. Il n’y a plus de conscience dedans, c’est un simple véhicule déconnecté de tout. Quand un corps éveille du désir sans même que la personnalité ne soit révélée, c’est bien qu’il est objet. Ainsi, la femme est réduite à ce statut : un objet de désir, un réceptacle aux fantasmes de l’homme. L’inverse est vrai aussi. Le drame se produit quand la femme ou l’homme intériorise et accepte cette représentation d’elle-même, de lui-même. Qu’elle participe à être objet et non plus sujet.
L’impact de la sexualité déviante dans nos vies
Vivre une sexualité déviante nous coupe de notre nature et nous assimile à des objets sans conscience. Pire, pour stimuler davantage de désir, cela nous pousse à la perversion et à la violence. Répéter des expériences similaires ancrent en nous des habitudes qui loin de nous apaiser, nous vident de nos énergies et nous asservissent. Par ailleurs, l’intelligence artificielle présente dans bien des domaines n’est pas en reste avec celui de la pornographie. Des contenus sont générés sur demande par l’IA pour répondre à tous les fantasmes imaginables. On ne peut qu’entrevoir où l’absence de limites nous mènera.
Homme et femme subissent les conséquences d’une telle forme de sexualité. Il n’y a pas de gagnants dans cette façon de relationner avec nos corps. Considérer la sexualité comme une pratique dissociée de notre esprit et de notre coeur est le meilleur moyen de se perdre et de se trahir. De créer plus de division dans nos vies et d’oublier ce qui nous constitue et nous anime : l’Amour.
La sexualité est probablement la relation la plus intime que nous ayons avec notre corps. De nos jours, elle est la plus exposée et donnée en pâture à des yeux avides comme si elle n’avait que peu d’importance. Longtemps, les religions ont sacralisé l’acte sexuel en y posant une morale forte et restrictive, sans expliquer réellement en quoi la sexualité est un acte sacré. Or, il est essentiel aujourd’hui de revenir à cette compréhension profonde.
Crédits photo : ©diego-ph
A lire aussi…
Je suis Amélie, la fondatrice du Bouleau Enchanté et l’autrice de ces articles. Merci de votre présence ici. Vous pouvez retrouver les articles en format podcast sur la chaîne Youtube du Bouleau Enchanté.